Ni Dieu Ni Bête

Si une certaine liberté, créatrice de lien social, doit être préservée dans les rapports humains, il ne s'agit par contre pas de promouvoir une autonomie du marché, du capitalisme mondialisé.

En effet, le système libéral est producteur d'inégalités.

Une intervention de l'état par la loi est donc souhaitable dans ce cas car l'autorégulation du marché ne fait que renforcer ces inégalités, accroître la dette publique par exemple.

L'absence de contrôle de l'état sur les flux financiers ne fait qu'augmenter les richesses des plus riches et n'améliore en rien le quotidien des plus démunis. C'est une certitude : alors que le nombre de milliardaires grandit, la pauvreté s'installe par ailleurs (voir le site OXFAM).

Il existe donc des cas dans lesquels l'intervention verticale de l'état semble nécessaire et souhaitable. La loi n'est pas alors une limite à la liberté mais un frein au libéralisme producteur d'inégalités sociales.

Il semble alors ici que la loi soit une condition de la liberté, la condition d'un usage autonome de son action sociale sur une base égalitaire.

Adam Smith ou Hegel dont se réclament parfois les tenants du libéralisme expliquaient, pour le premier, qu'une "main invisible" régulait le marché et que l'état n'avait pas à s'immiscer dans ses rouages, le second, qu'une "ruse de la raison" oeuvrait au sein de l'histoire et que chacun de nous, croyant suivre ses intérêts particuliers seulement, concourrait en fait aussi à une sorte de marche de l'histoire providentielle.

C'est vraiment déculpabiliser tout individualisme que de proclamer cela! En vivant tranquillement dans mon petit coin, ne m'occupant de rien d'autre que de moi, je contribue pourtant au bien être de tous, c'est à dire à la bonne marche du marché capitaliste mondialisé. La misère dans le monde, le désespoir ne me concernent pas. Je peux m'en sortir tout seul!

Cela est doublement faux, en pratique et en théorie.

En pratique, la triste réalité de la misère dans le monde le montre assez. Des lois sont nécessaires pour niveler les inégalités et contrôler l'évasion fiscale, taxer les transactions financières.

En théorie aussi cela est faux. Nous en trouvons par exemple dans La Politique d'Aristote un démenti formel : "pour vivre seul il faut être une Bête ou un Dieu". La bête exclut tout rapport, dieu excède tout rapport possible. L'homme se situe entre les deux, il est, déclare Aristote, un "animal politique", il est dans sa nature d'être en rapport, c'est un être de rapport, de relation à autrui dans l'administration de la Cité. Il est dans sa nature de produire des lois. La liberté n'est pas absence de loi si cette dernière est au contraire ce qui "organise et entretient l'amitié entre les hommes".

Le rôle de l'état est donc d'entretenir ce rapport (cette amitié ou fraternité) mis en péril par le libéralisme qui sépare, isole et violente.

S'il existe une spontanéité pulsionnelle (on y revient toujours!), je crois que cette pulsion est d'essence relationnelle et que tout acte politique, toute créativité est un acte de mise en relation.

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